Le Jardin des Sens
explorations au-delà du goût
Le restaurant des frères Pourcel va fermer ses portes en Mars 2016… je sais, c’est la deuxième fois que je vous fais le coup récemment mais il va falloir se magner l’oignon si vous voulez manger au Jardin des Sens !
Chopez le premier TGV venu, ou si vous habitez Montpellier, le premier Tram venu, et allez vous laisser choyer par la cuisine faussement simple et hautement généreuse des fameux chefs jumeaux du Languedoc-Roussillon. Vous ne le regretterez pas, parole de barbu !
Amuse-bouches (au pluriel)
Je ne vais pas vous décrire chaque bouchée, chaque feuilleté, chaque crêpe de sarrasin chapeautée de saumon, chaque croquette de pied de porc… Toutes ces attentions passaient comme une lettre à la poste, elles n’interrompaient pas la conversation, et pour être honnête ne présageaient pas vraiment de la claque gastronomique que Mme. Tilash et moi étions sur le point de se recevoir en pleine tronche.
Amuse-bouche (au singulier)
Pour démarrer officiellement notre menu déjeuner : un flan de pommes de terre au parmesan avec une espuma de vitelottes, et un nem de potimarron et châtaignes. Là tout de suite, la conversation se délite, et on commence à se recentrer sur le palais. Le flan marche sur la pointe des pieds avec grâce, on l’écoute, il nous murmure sa pointe salée et fromagère sans faire de vagues, et le nem est essentiellement là pour apporter ses percussions croquantes, mais il n’en est pas moins nécessaire.
La royale fondante de cèpes, velouté de topinambours, quelques trompettes des morts, cube de foie gras et sa tartine, écume de cèpes
Laissez-moi ravaler ma salive… un instant… Avez-vous déjà médité ? Avez-vous déjà été en transe ? Avez-vous déjà plongé au fond de vous-même, dans les profondeurs de votre âme, compris que le temps est une illusion, que le soi est une illusion ? Avez-vous déjà été dans cet entre-deux où le bien-être n’est pas une vague violente d’endorphines, mais simplement un état serein où le bonheur et le malheur sont des notions absentes ? Cet espace qu’il faudrait cultiver quotidiennement, je ne l’ai effleuré que peu de fois. L’une d’entre elles fut en mangeant ce plat.
L’émincé de pièce de bœuf dans le contre filet et son tartare aller/retour (origine charolaise), rosace de pomme de terre, caviar d’aubergine, jus aux condiments poivré
Remontée sur Terre, les pieds bien ancrés dans le sol, pour le plat principal. Cette assiette bistronomique, était efficace, impeccable, à l’exception du « tartare aller/retour » qui, du fait de sa taille réduite, se transforma en burger à point (ce qui ne le rendit pas insolent pour autant). Mais après une telle entrée, il fut difficile d’admettre que ce mets, que j’aurais été ravi de trouver dans un bistrot gastronomique, partageait la vedette avec la majesté champignonesque précédemment ingurgitée.
Golden confite, mousse caramel et phyllo, sorbet de pomme verte, chips de Granny Smith
C’était pourtant logique, j’aurais du m’en douter… Mais en voyant arriver ce dessert, je ne pus m’empêcher de le regarder du coin de l’œil. Pourtant, après le voyage intérieur, après la route terrestre, il fallait bien décoller… Alors je me suis fait léger, cuillerée après cuillerée, j’ai pris un sourire béat, et je me suis envolé. Comment un dessert aux pommes peut-il être aussi délicat, aussi envoutant ? Vous voulez vraiment que je vous parle du sucré de la pomme confite, de la suavité de la mousse, de la fine acidité de la glace ou du croquant de la chips ? Mais ce ne sont que des considérations triviales, matérielles… alors qu’on se trouve devant un dessert spirituel.
Les gourmandises
La petite amande chocolatée servie avec le café était ici remplacée par des madeleines parfaitement cuites, des beignets divins à la crème de vanille, des tartes aux noix et macarons fantastiques, de la pâte de fruit et guimauve, que je n’affectionnent pas particulièrement habituellement, évanescents et raffinés… Oui il y avait aussi un granité de mangue et fruit de la passion avec une mousse de caramel au beurre salé, oui il y avait une sucette de glace au litchi enrobée de chocolat blanc… Oui ça débordait de générosité, de maîtrise, de talent…
Je suis essoufflé. Ce déjeuner fut presque parfait, et pour être honnête je suis infiniment reconnaissant aux frères Pourcel d’avoir glissé ce « presque » là-dedans, d’avoir su servir un plat plus « rustique » (si l’on peut dire) pour assurer ma santé mentale. Car sans ça, je ne sais pas si j’aurais pu écrire cet article, sans ça je ne sais pas si j’aurais pu redescendre de mon extase illuminée.
Le Jardin des Sens
11 Avenue Saint-Lazare
34000 Montpellier, France
Tél. : 04 99 58 38 38Ouvert tous les jours sauf le dimanche, lundi midi et mercredi midi.
Le menu déjeuner est à 49€ par personne (avec un verre de vin inclus), soit un rapport qualité-prix fantastique.
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